Chaque procureur de la CPI a son caractère. Ainsi, autant Fatou Bensouda était très directive, mais pouvait arrondir les angles, et si Ocampo Moreno semblait réservé, et trop prudent, l’actuel Karim Kahn a au moins une qualité qu’on ne saurait lui denier : l’obstination ou la détermination. On dira que quand on est procureur d’une justice supranationale, il en faut. Soit ! Mais, oser s’intéresser judiciairement à Poutine ou à Netanyahou, il faut du cran pour le faire. Karim Khan l’a fait.
Et si la CPI a été accusée à tort ou à raison, d’être l’instrument judiciaire pour taper les hommes à fort taux de mélanine, elle n’en demeure pas moins utile toujours. Depuis le 26 février 2025, la CPI propose donc de créer un Tribunal spécial pour la RD Congo, afin de juger des crimes de ces 30 dernières années commis dans ce pays continent.
C’est ce qu’a laissé entendre Karim Khan faisant écho à la présidence congolaise qui organisera en avril 2025, «une conférence internationale sur la paix, la sécurité et la justice», pour passer au peigne fin les causes de la guerre permanente dans l’Est de la RD Congo.
Le Tribunal spécial pour la RD Congo pourrait aussi voir le jour. Voir le jour ne signifiant pas être automatiquement opérationnel. Karim Khan estime que depuis 2002, 3 personnes en RD Congo ont été condamnées pour atrocités dans l’Est de la RD Congo. C’est insignifiant comparé aux crimes commis.
Un tel Tribunal est salutaire, mais vu la période concernée (3 décennies), les imbrications de cette guerre (Rwanda, Ouganda) les ramifications, les acteurs, ce TPS RD Congo aura un gros pain sur la planche pour ne pas dire que c’est un pari risqué que prend Karim Khan. C’est un essai, mais pourquoi en lieu et place d’un tel instrument, ne créerait-on pas des cours africaines, comme celle qui a jugé Hissène Habré à Dakar ?
Certes, l’initiative est soutenue par le prix Nobel Dénis Mukuenge, mais vu les moyens à mobiliser, la sécurisation des témoins vivants, des fosses communes… C’est le fleuve Congo à boire que de démarrer une telle machine judiciaire.
Mais, qui sait avec un Karim Khan très décidé, la collaboration des pouvoirs congolais et des moyens conséquents, la gageure peut être gagnée. Répertorier les crimes de ces 30 dernières années à l’Est de la RD Congo, et châtier les coupables, chacun le veut bien, mais sa mise en branle, il faut attendre pour en être fixé. Mais, tout commençant par le premier pas.
La REDACTION
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