Sommet EAC-SADC sur le conflit à l’Est de la RD Congo : Dar-Es-Salam butte sur la «doctrine de Monroe» du M23

Sommet EAC-SADC sur le conflit à l’Est de la RD Congo : Dar-Es-Salam butte sur la «doctrine de Monroe» du M23

 

 

Grosso modo, le raout des 2 organisations des Communautés régionales d’Afrique australe et de l’Est ont accouché de 10 décisions qui sont entre autres : cessation des hostilités et cessez-le-feu sans condition, l’ouverture de l’aéroport de Goma et des voies d’approvisionnement terrestres et lacustres, rapatriement des corps des victimes et blessés…

Mais, il est de ces résultats de ce conclave qui interrogent sinon qui coincent déjà avec l’existant sécuritaire dans ce Kivu en pleine ébullition. Ainsi, si les chefs d’état-major de l’EAC et de la SADC, ont été instruits par ce sommet des princes d’aller d’ici le 13 février 2025 pour constater de visu, «le plan de sécurisation dans la ville de Goma et des environnants», on se demande comment ? Par quels moyens dans une capitale du Nord-Kivu, occupée par le M23 qui a tenu meeting ce 6 février 2025 ?

Dar-Es-Salam a évoqué également une coordination des actions entre les 2 processus arrimés à ce conflit à l’Est de la RD Congo, ceux de Luanda et de Nairobi, malheureusement ces 2 processus sont en panne et mieux ou pire, il a été question de fusionner ces 2 processus, et d’y adjoindre d’autres facilitateurs. Si en Afrique comme on dit «trop de viandes ne gâtent pas la sauce», multiplier les négociateurs dans ce conflit vieux de deux décennies pourrait ne pas être la solution.

Autre décision réaliste, celle-là, la relance du dialogue avec tous les protagonistes de la guerre y compris le M23. Même la SADC, foncièrement contre ce scénario n’est pas contre, et la RD Congo, devrait se rendre à l’évidence, que tout cale sur ce groupe du «23-Mars 2009» et pas question de parlementer sans lui, surtout qu’il est maître du terrain à Goma. Se parler mais agir surtout. D’ailleurs à Kinshasa, Mgr Fridolin Ambongo, dans une homélie bien à propos a invité la Communauté internationale (CI) à aller au-delà des propositions pour ne pas dire des incantations. On n’est pas loin de dire que Dar-Es-Salam, excepté la participation des 2 présidents fut un sommet de plus, sans apport réel dans la résolution de la guerre.

Un autre écueil que Dar-Es-Salam a cru évacuer au détour d’une décision est de dire qu’il faut un plan harmonieux de désarmement des FDLR, pro-RD Congo, et la levée des blocus établis par le M23 soutenu par le Rwanda ! Ici aussi, cette décision tient-elle compte de la posture actuelle du M23, lequel après Goma, est en route pour Bukavu ? Pèse-t-on au trébuchet,  l’imminence de la prise de l’aéroport de Kavumu, dernier verrou avant la capitale du Sud-Kivu ? Alors que Nyabibwé est cous coupe réglée du M23, localité distante de 100 km de Bukavu !

Et lorsque dans la capitale tanzanienne, on a parlé de l’élaboration d’un plan de retrait des «Forces étrangères non invitées», expression assez vague, tient-on compte de l’évolution volatile du terrain ?

Le conclave de ce samedi 8 février 2025 à Dar-Es-Salam a le mérite d’avoir pu faire participer les 2 présidents Paul Kagame en présentiel et Félix Tshisekedi en visioconférence, une prouesse qu’on doit au président William Ruto du Kenya, et compte tenu des positions diamétralement opposées entre l’EAC et la SADC sur le M23, on ne peut que se féliciter de la tenue d’un tel sommet après les flops de Luanda et de Nairobi.

Cependant, de cette dizaine de décisions ou de recommandations de la capitale tanzanienne, il faut convenir, qu’elles buttent sur une version de la «doctrine de Monroe» du M23, dont l’expansionnisme et l’hégémonisme trouvent leurs origines dans le lointain génocide rwandais de 1994.

La guerre qui sévit dans la partie orientale de la RD Congo, est le prurit sanguinolent de ce génocide : les rescapés d’il y a 31 ans, qui avaient créé le CNDP, formation politico-militaire dont les éléments avaient intégré les FARDC, mayonnaise qui n’a pas pris, ces ex-CNDP, transformés en rebelles le 23 mars 2009, pensent que le Nord et le Sud-Kivu, sont leurs terres naturelles. Vue de Kigali, on n’en pense pas moins, d’où cet interventionnisme de ce M23 dans l’Est, assimilée à une invasion étrangère, sous le prisme congolais. La «doctrine de Monroe» jadis, chère aux Etats-Unis d’Amérique, fonctionne à plein régime dans le Kivu, bastion de suppliciés rwandophones de 1994, écartelés entre deux pays qui se battent pour eux mais aussi pour ce minerai, le coltan qui rentre pour beaucoup dans la fabrication des téléphones portables, alors que le Kivu en renferme plus de 50% des réserves mondiales ! Une «doctrine de Monroe» adossée évidemment à des bases économiques et financières ! Ça donne ce cocktail perpétuellement inflammable.

Zowenmanogo Dieudonné ZOUNGRANA

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