Et de 3 pour les 2 grandes confessions religieuses de la RD Congo. Après avoir rencontré le président Félix Tshisekedi et l’opposition, les catholiques et protestants ont pris pied à Goma hier 12 février 2025 pour prendre langue avec le M23 ou plutôt une de ses figures de proue, Corneille Nanga, patron de l’AFC, et allié du M23.
Des hommes de Dieu très célèbres tels Fulgence Muteba Donatien Sholé de la CENCO, le révérend André Gédéon et son porte-parole, Eric Nsenga conduisent ces missi dominici à la recherche de la paix. La semaine dernière déjà, ces hommes en soutane, avaient donné le ton en affirmant qu’il fallait parler à tout le monde, y compris le M23.
D’abord, il faut saluer ce réalisme et pragmatisme de ces pasteurs qui œuvrent pour protéger leurs brebis. Réalisme car Kinshasa ne peut pas ne pas négocier avec le M23 qui est maître à Goma, et risque de mettre Bukavu, la capitale du Sud-Kivu sous coupe réglée.
Et pragmatiques, ces confessions le sont aussi car elles savent que plus ça s’enlise dans ce Kivu incandescent, moins, il y a des chances d’éteindre l’incendie et plus aussi, les solutions deviennent corsées. Et même si l’UDPS, le parti présidentiel n’est pas d’accord avec cette démarche de l’Eglise, et même si au sein des différentes confessions religieuses, il y a des préséances picrocholines, qui parlent «d’inclusivité» et de la nécessité que toutes les Eglises y soient, l’arbre à palabre proposé a le mérite d’avoir renoué le fil du dialogue avec le M23, maître sur le terrain.
Ces chassés-croisés diplomatiques entamés par les princes de l’Eglise et les pasteurs protestants mettent au centre de ce conflit un homme, qui s’affiche de plus en plus incontournable : Corneille Nanga. Qui est-ce monsieur, ex-président de la CENI qui avait proclamé les résultats de la présidentielle en 2018, en faveur de Félix Tshisekedi, au prix, selon diverses sources d’un deal électoral ?
Martin Fayulu, continuant jusqu’à présent à fulminer qu’il est le vainqueur, on spécule et on entend du tout sur cette élection. N’empêche que quelque-chose s’est passée entre «Fatshi» et Corneille Nanga, c’est le moins qu’on puisse dire. Celui qui a reçu la délégation ecclésiale venue de Kinshasa, a changé de look, la barbe blanche est fournie, un peu hirsute, l’homme s’est un peu empâté, mais le verbe reste haut, comme du temps de la CENI.
Interview aux médias, meeting du 6 février dernier au stade de Goma, Corneille Nanga ne cache pas ses ressentiments envers Félix Tshisekedi : «Puisque c’est moi qui l’ai installé, c’est à moi de l’enlever». Sibylline cette phrase captée lors d’un entretien, n’en cache pas moins deux choses : Il y a 7 années, c’est bien lui qui a déclaré Tshisekedi vainqueur, mais pourquoi veut-il l’évincer par la force, alors qu’il a été réélu ? L’activisme guerrier et violent de ces derniers temps du M23-AFC trouve aussi peut-être des réponses, dans ce ressort cassé entre Tshisekedi et Corneille Nanga. Et aujourd’hui, l’homme semble tenir quelque-chose hormis le mouvement politico-militaire AFC !
Est-ce le fait d’avoir été mal rétribué politiquement pour avoir été à la baguette dans la victoire «manipulée» en 2018, et d’avoir été condamné à mort par contumance par un Tribunal militaire en 2024 que son Alliance fleuve Congo (AFC) est sur le sentier de la guerre alliée du M23 ? On savait que depuis 2023 année où il dévoila le tripatouillage des résultats électoraux, on le savait marinant dans sa rancœur, mais de là à aller se mettre aux côtés du M23, c’était inimaginable !
Par la poudre et le canon, le voici de nouveau au cœur des attentions, le voici l’homme par qui la paix peut advenir, même si on sait qu’il faut au moins un feu orange d’Urugwiro village, la présidence rwandaise. Le voici, l’homme-tampon, boutefeu et pompier, mais jouant aussi sa survie tout court.
Hier à Goma, c’est un Corneille Nanga qui savoure intérieurement une revanche, le voici interlocuteur attitré du M23, face à une corporation qui compte et qui est écoutée en RD Congo : les hommes de Dieu. Que peut espérer Corneille Nanga ? A quoi joue l’enfant de Haut-Uele ? Peut-il peser dans l’issue de cette guerre ? En tout cas, il entend jouer une partition dans ce conflit.
La REDACTION
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