Présidentielle malienne : Nerfs à fleur de vote, insécurité et fichier électoral crisogène

Présidentielle malienne : Nerfs à fleur de vote, insécurité et fichier électoral crisogène

Les Maliens avaient apparemment les nerfs à fleur de vote, élan bridé manifestement par la situation sécuritaire et ce fichier électoral bancal. «Tu vas au Mali ? T’es-tu doté d’un gilet pare-balles ?», plaisantait un ami de notre envoyé spécial alors qu’ils se sont vus à l’aéroport avant l’embarquement. Heureusement depuis la campagne jusqu’au vote hier 29 juillet, exceptés les incidents de Falia, de Douentza, marginaux du reste, le scrutin s’est déroulé pacifiquement. Même si l’on sait que l’ombre du redoutable Iyad Ag Ghaly des Ifogas a plané sur le scrutin. Alors les Maliens sont-ils allés voter massivement ou ont-ils préféré vaquer aux travaux champêtres, aller à la pêche ou rester simplement chez soi ?

A Bamako, Sikasso, Koulikoro, régions densément peuplées, de l’ouverture jusqu’à la fermeture des bureaux de vote, les électeurs sont sortis de façon disparate, signe que le taux de participation, ne saurait atteindre le sommet du Mont Koulouba. Juste peut-être des proportions raisonnables. Quant au Nord, pour peu peuplé qu’il soit, et en dépit de la cour dont il fut l’objet de la part des candidats, la question sécuritaire explique en partie la désaffection des électeurs. Mais pas seulement ! Ce désamour est dû également aux impostures de bon nombre d’hommes politiques qui, depuis des années sérinent les mêmes promesses qui n’engagent que les Maliens qui y croient.

Les populations sont surtout blasées, un tantinet, énervées par cette histoire du fichier électoral, qu’elles en viennent à se demander : à quoi sert cette élection ? Pour le cas d’espèce, jusqu’au 28 juillet dans la soirée, soit donc à la veille du scrutin, malgré une réunion houleuse, le Premier ministre Soumeylou Boubeye Maïga n’a pas pu convaincre les 23 représentants des formations politiques de la crédibilité de ce  fichier électoral. Depuis la semaine dernière, l’opposition et plus précisément, Tiébilé Dramé, le directeur de campagne du principal challenger d’IBK, a jeté un gros pavé dans le fleuve Djoliba, en excipant un écart de presqu’un million de voix entre le fichier du 27 avril qui a servi de confection de cartes électorales, et celui mis sur le site le 4 juillet. Un nœud gordien non tranché, qui préfigure un imbroglio électoral à plusieurs détentes.Pire le gouvernement renâcle a remettre aux observateurs internationaux la liste des communes où le scrutin n’a pas eu lieu pour cause d’insécurité. Ce qui en rajoute à la méfiance ambiante.

Comment expurger les morts, fantômes déplacés et autres doublons qui ont gonflé ce corps électoral ? On fera avec semble avoir maugrée Boubeye Maïga. La conséquence est que ce fichier électoral querellé fait partie des ingrédients d’une contestation postélectorale, pour ne pas dire une crise d’après présidentielle, qu’on ne souhaite pas à l’ivoirienne ou à la kenyane. Chacun sait qu’une élection se gagne maintenant, non plus par les puérils et grotesques bourrages d’urnes, mais, en amont, par le vol informatique, le gonflement des listes. Ainsi, la moindre avance par exemple d’IBK sera mise sur le compte de ce tripatouillage alors que tout le monde sait qu’en Afrique, les fraudes sont l’apanage du pouvoir comme de l’opposition. Certes, la présidentielle malienne est épiée par une centaine d’observateurs de l’UE, par ceux de la CEDEAO et par un millier de la société civile.

Mais la confiance ne règne pas, et l’opposition craint un remake des pratiques délictuelles de 2013. Alea jacta est ! Les dés sont jetés, les Maliens ont voté. Par quelle prestidigitation dans ce contexte, la DGE et la CENI pourront-elles proclamer les résultats provisoires sans qu’il n’y ait tambouille ? Quel duo des 24 alpinistes de la colline du pouvoir sera qualifié pour le second round du 12 août ? Réponse au plus tard le vendredi 3 août, d’ici là, ce sera la semaine la plus longue et la plus cruciale pour cet ex-Soudan français, tenaillé par des djihadistes depuis 2012 et qui se cherche un nouveau président pour les cinq ans à venir.

Zowenmanogo ZOUNGRANA

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