Les manifestants contre les polémiquées lois électorales ont remis leur marche hier 23 avril dans le calme pour honorer les trois tués de samedi, un calme dû à l’organisation interne des opposants, mais aussi aux forces de l’ordre qui sont restées coi, contrairement au samedi où courses-poursuites, jets de lacry ont prévalu. Enfin, ils doivent cet armistice gouvernemental, au préfet de la ville Angelo Ravelonarivo dont la tonalité du discours allait dans le sens de l’apaisement, tout en laissant libre cours aux manifestants. Deux lectures se dégagent de ce second grand mouvement de foule malgache de la semaine :
– Premièrement, cette bronca contre les lois électorales et par ricochet contre le président Hery Rajaonarimampianina s’avère pain béni pour les deux principaux opposants que sont les ex-présidents Marc Ravalomanana (2002-2009) et Andry Rajoelina (2009-2014) qui ont profité se requinquer politiquement par dons de vivres, déclaration mi-populiste mi-sincère ou bains de foules interposés. Et si l’ancien ‘’Dj’’ Andry Rajoelina, n’a rien à craindre des nouvelles lois, il n’en va pas de même pour Ravalomanana qui sera frappé par celles-ci puisque l’une d’elles stipule qu’un candidat doit faire connaître tous ses déboires judiciaires, or lui est sous le coup d’une condamnation.
– La seconde leçon est l’attitude de la soldatesque qui a clairement fait savoir qu’elle est le dernier recours, comme dans plusieurs pays africains, mais qu’elle ne servira plus de cheval de Troie aux civils qui, lorsqu’ils sont embourbés dans leurs querelles picrocholines lui font appel. Mieux, l’armée, restera neutre et républicaine, comme l’a martelé le ministre de la défense, le général Beni Xavier Rasolofomirina, et il n’est pas question d’un éventuel pronunciamiento, ni de l’avènement d’un pouvoir de la rue, qu’elle avalisera. Pas donc de coup d’Etat, ni d’insurrection, seules les urnes ont droit de cité, foi de l’armée ! Des militaires qui ont laissé donc faire, pour ne pas dire qu’ils ont fraternisé avec les manifestants, ce qui constitue un pied de nez au président Hery, qui dès samedi, en père-fouettard invitait les soldats «à prendre ses responsabilités» contredisant en même temps et le président du sénat et le Premier ministre, qui ont tenu des discours rassérénants. En vérité, dès samedi, les policiers avaient donné le tempo en quittant les lieux, suivie de la déclaration de pacte de non-agression de la gendarmerie d’avec les opposants, le même jour dans l’après-midi. Les forces militaires, ne voulant pas être en reste, ont opté d’emboîter le pas à ces policiers et gendarmes. Si donc la grande muette a choisi d’abandonner cette mythique place du 13-Mai, en référence à la héroïque lutte contre l’oppresseur en 1973 au cours de laquelle, 29 martyrs périrent, si donc elle a adopté cette posture, c’est qu’elle a tiré leçon du passé et ne veut plus être manipulée, ni par le pouvoir ni par l’opposition. Mais surtout, en usant d’une prétérition, (en français facile, parler d’une chose, sans en donner l’impression) le ministre de la défense, lance un avertissement à peu de frais à tous les partisans de raccourcis pour accéder au pouvoir et tous ceux qui pensent se servir des militaires pour tirer leurs marrons du feu. Chapeau bas donc à cette armée malgache, et c’est de plus en plus de telles armées dont l’Afrique a besoin, pour lutter par exemple contre le terrorisme, plutôt que de la voir descendre dans l’arène politique, petitement et bruyamment à coups de fusil.
Sam Chris
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