Législatives en Côte d’Ivoire : Le RHDP gagne dans les isoloirs mais pas dans les cœurs

Législatives en Côte d’Ivoire : Le RHDP gagne dans les isoloirs mais pas dans les cœurs

C’est officiel le Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP) est la grand vainqueur de l’élection législative du 6 mars dernier. Première élection ouverte depuis 2011, ce scrutin qui a connu la participation de l’opposition a lieu 4 mois après une élection présidentielle particulièrement sanguinolente avec 81 morts et plusieurs dizaines de blessés sur le carreau.

Selon les résultats provisoires proclamés par la Commission électorale indépendante (CEI), le RHDP affiche à son compteur 137 élus, soit 54% des sièges. Pendant ce temps, la nouvelle alliance des deux familles politiques pro-Bédié et pro-Gbagbo compte 81 députés, 32% du total. Les Indépendants, issus majoritairement du parti au pouvoir ont engrangé 26 sièges soit 10% et les autres petits partis de l’opposition se partagent les 10 sièges restantes soit 4% des sièges. Premier constat, si le parti au pouvoir ne s’est pas trop brûlé les ailes à ce suffrage universel, le conglomérat EDS-PDCI-FPI n’a pas non plus fait le trop-plein de voix comme il escomptait. Les Ivoiriens sont-ils fatigués du politique ou de la politique ?

Et aussi si la razzia clamée sur tous les toits au sein du RHDP n’a pas eu lieu, il ressort clairement que le président Ouattara, qui vient de débuter un troisième mandat «indu» est certain de disposer d’une majorité qualifiée pour opérer les modifications constitutionnelles qui lui tiennent à cœur. A ce titre, il pourra compter sur une bonne frange des «indépendants», qui n’étaient que des seconds couteaux de son parti lors de cette bataille électorale pour avoir les coudées franches lors de ce quinquennat chargé de défis. Notamment les 16 qui ne sont «indépendants» que de titre mais qui roulent bien pour le RHDP, comme l’a du reste laissé entendre Adama Bictogo.

Après cette victoire acquise dans les urnes, Ouattara et ses adversaires devront manœuvrer pour redonner le gout de la chose politique à leurs concitoyens qui désaffectent les urnes. Le taux de participation de  37,88% enregistré  à ce scrutin témoigne du dégout de plus en plus prononcé qui anime les Ivoiriens depuis les heures sombres de la crise postélectorale d’il y a 10 ans qui a endeuillé un pays jadis réputé «havre de paix». Ces évènements ayant mis à mal le tissu social restent en travers la gorge de plusieurs Ivoiriens des villes, villages et campements d’où l’urgence de mettre en route le processus de réconciliation nationale amorcé après la «crise du 3e mandat».

Loin des chapelles politiques qui font et défont les opinions au gré des vents, les cœurs des Ivoiriens restés  bien longtemps à la diète attendent avec impatience cette catharsis sociale pour redonner gout à leur quotidien et l’amélioration des liens intercommunautaires. A présent donc, il est de la responsabilité du pouvoir et de son président (Alassane Ouattara) d’imprimer la meilleure dynamique à ce processus désormais confié à l’ancien député de Lakota, Kouadio Konan Bertin (KKB).

En effet, depuis 30 ans, depuis que le «vieux» l’a appelé auprès de lui comme son unique et premier ministre, Alassane Ouattara a toujours été au coeur des crispations politiques et identitaires des polémiques, et 3 décennies après, les motifs ou raisons de toutes ces cristallisations ont peut-être changé, mais demeurent. A l’orée de ce 3e mandat, obtenu avec 81 macchabées sur le carreau, il est plus que temps pour lui de donner le véritable «la» à cette couture de la cohésion sociale. Ça doit être son objectif primordial au-delà des acquis infrastructurels et des taux de croissance enviés, Ouattara aura raté le coach s’il quitte la scène avec ces 2 Côte d’Ivoire. Il a les cartes en main, malgré cette loi des séries déclinées en pathos qui trouble son entourage ces derniers temps.

En effet, cette victoire est acquise au moment où la galaxie ADO est frappée de plein fouet par une succession de «malaises» dont le dernier en date (transfert d’Hamed Bakayoko par exemple en Allemagne pour des soins), inquiète plus d’un. Cela pourrait être perçu comme un signe du temps au locataire du palais de Cocody, pour l’informer qu’il ne disposera pas d’une éternité pour entrer dans l’histoire du pays d’Houphouët par la grande porte à travers des actions fortes. Cela passera nécessairement  par une Côte d’Ivoire réconciliée avec elle-même où les Ivoiriens pourront se regarder sans coloration ethnique ni politique .

Davy Richard SEKONE

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