Ce que redoutaient plusieurs acteurs et protagonistes de la scène politique tchadienne prend forme progressivement et allégrement. Et plus que jamais, on s’achemine tout droit vers une dynastie des Déby. Hier lundi 10 octobre 2022, Mahamat Idriss Déby, fils d’Idriss Déby Itno (tué au combat) a été investi président, à l’issue du Dialogue national inclusif et souverain (DNIS). Cette investiture censée marquer un nouveau départ pour le pays abonné aux guerres et rebellions de tout genre intervient dix-huit mois après que le fils a hérité à son défunt père, au terme de moult bricolages et arrangements politiques.
Après cet exercice «grossier», le jeune général Mahamat Idriss Déby devient président de la Transition du Tchad, simple changement de titre peut-on dire, d’autant plus qu’il occupait la présidence du Conseil militaire de la Transition (CMT), principal organe dont la dissolution a pour seul objectif de donner une apparence civile à ce régime «militaire» dans l’âme. Kaka, comme on le surnomme, bénéficie également d’un bail de vingt-quatre mois supplémentaires et peut faire acte de candidature à la prochaine élection présidentielle.
Ce DNIS présidé par l’opposant historique Gali Ngothé Gatta n’aura donc servi qu’à entériner le pouvoir de Déby-fils et de perpétuer une dynastie à la tête du Tchad. Ouvertes en août après de multiples reports, les concertations ont uniquement servi à élargir les prérogatives du chef de l’exécutif, qui obtient désormais le droit de révoquer le premier ministre, et à entériner son apparente volonté de conserver le pouvoir. Et on comprend les remous qui ont caractérisé la tenue de ces Assises qui ont vu plusieurs entités quitter la salle. Avant de se retirer définitivement du processus, l’Eglise catholique avait ainsi suspendu sa participation à mi-parcours «pour ne pas cautionner la main mise d’un groupe», évoquant son «impression d’assister à une campagne électorale, avec d’un côté ceux qui soutiennent le changement et un renouvellement de la classe politique et de l’autre ceux qui bloquent tout et veulent continuer comme avant, en mettant en place une machine savamment orchestrée».
Dès les premiers moments, l’opposition politique incarnée par Succès Masra des «Transformateurs» avait annoncé les couleurs en se mettant en retrait. Cette position avait été celle du FACT et de la société civile conduite par Wakit Tama. Mais leurs voix avaient été submergées et rendu moins audibles par la hauteur des ambitions d’un groupe qui occupe les arcanes du pouvoir depuis plusieurs décennies. Que pourront ces voix discordantes face à la ténacité des Déby et de l’armée acquise à sa cause ? Les appels de l’UA seront-ils entendus ? Pas sûr ! Voilà donc, Déby-fils sur les traces de son père Itno dont il est le digne légataire !
Davy Richard SEKONE
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